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  • Mémo'art d'Adrien

L'ambition, d'Amélie de Bourbon Parme



« Défense de déposer du sublime dans l’histoire », écrivait Victor Hugo. A ses risques et périls, Amélie de Bourbon a enfreint cette défense. Et pour notre plus grand bonheur.


Le sublime démarre dès le titre du roman. L'ambition. Trois syllabes pour l'éternité. Mot empreint d'une mauvaise réputation, l'historienne lui rend ses titres de noblesse, en l'associant à son aïeul, le futur Paul III, dont le destin méritait un roman.


Le sublime ne s'arrête pas là, puisque ce roman est le premier volet d'une trilogie intitulée "Les trafiquants d'éternité". Admirez ce nom somptueux, si beau, et si révélateur de l'esprit du roman.


Car Paul III est un personnage unique : il incarna à la fois l'éternité en étant pape, et le pouvoir temporel, en créant une dynastie, en léguant un héritage, et en faisant sien le nom du duché qu'il fonda : Parme. C'est un cas unique dans l'histoire.


Dans ce premier volet, on suit les jeunes années du futur pape. Alessandro Farnese est un jeune aristocrate provincial, promis à une carrière ecclésiastique, et appartenant à une famille peu connue, s'étant démarquée par les armes.


Par son ambition, il souhaite se hisser au sommet de l'Eglise. Il profite alors de l'instabilité politique d'une Italie fragmentée entre Etats, et du contexte d'une papauté corrompue. L'époque est celle de tous les possibles. La Renaissance italienne connait une extraordinaire effervescence humaniste, artistique et politique.


Le sublime est également amoureux. La romancière conte avec talent la manière dont Alessandro se sert des charmes de sa sœur, maîtresse du pape Rodrigo Borgia. Il rencontre également celle dont il restera amoureux toute sa vie. L'intimité est atteinte dans ce roman de manière parfaite : sans pathos disproportionné, le lecteur est ému par ces personnages complexes, ambivalents et profonds.


Le sublime est dans le style. Quel bonheur de lecture, à une époque où la beauté de la langue française est parfois mise de côté. Quel style ! Quelle élégance dans le verbe, quelle finesse dans le sujet, et quelle prose pour les relier entre eux et en faire un opéra littéraire somptueux ! Je ne goûte pas mon plaisir !


Si vous lisez ce roman, vous croiserez la route des personnages les plus lumineux et les plus ténébreux de cette période extraordinaire : Rodrigo et Cesare Borgia, Laurent de Médicis, Pic de la Mirandole, Machiavel, Savonarole, etc. L’émulsion produite par la rencontre de tous ces grands noms participe à l’émergence de figures exceptionnelles comme celle du futur Paul III.


La romancière alterne le récit du futur pape avec des réflexions écrites par lui à la première personne, à une date que le lecteur ignore, et c’est une idée somptueuse : véritable confessionnal, ces passages atteignent l’intimité de Farnese. L’impression de lire véritablement son journal intime est désarmante. C’est indéniablement un des points forts de ce roman.


Enfin, concluons par les premières pages, où l’on retrouve le jeune Alessandro enfermé entre les murs du Château Saint-Ange. C’est là que tout commence. Le lecteur est captivé par le récit de cette captivité. Dès le début, il est privé de toute possibilité de faire autre chose que de lire ce roman formidable. Je pèse mes mots : cette captivité intègre les plus beaux récits d’enfermement de la littérature.


Que de sublime pour un seul roman, et c’est peu dire que la suite est attendue. L’ambition ne fait que démarrer. L’éternité nous attend.

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